Avant-propos

Kieros, PDG d’OMForum : « Bon PoF, ton article sur Morel a fait un score moyen, est-ce que tu te rends au moins compte que ça nuit à la productivité et à la crédibilité de notre organisation ? »

PoF : « Mais… Mais il était plutôt intéressant mon article, non ? »

Kieros : « Bah bien sur qu’il était intéressant, mais les gens s’en foutent pas mal de l’intérêt d’un article, bon sang de bois. Comme tu l’as dit dans ton article, Morel est un putain de campagnard sans intérêt… »

PoF : « MAIS !! Mais j’ai pas du tout dit ça, je dis même le contraire et… »

Kieros : « FERME-LÀ ET VA FAIRE UN ARTICLE VENDEUR, UN SUR BIELSA COMME TOUT LE MONDE !! »

PoF : « Oui, patron… »

Ah, le cas Bielsa… Il y a tellement d’articles à son sujet dans les journaux et sur le net qu’on a l’impression que tout a déjà été dit.

Le moins qu’on puisse dire, c’est que Bielsa cristallise les passions. Bielsa le génie du coaching, Bielsa le coach le plus nul de L1, Bielsa l’impoli, l’affectif, le testard… Tous les sujets y sont passés mais ce que j’ai remarqué d’étonnant, c’est l’extrémisme autour du cas Bielsa et là où c’est plutôt marrant, c’est qu’absolument chaque facette du cas Bielsa est bourrée d’extrémisme, de son propre comportement aux réactions des supporters et des journalistes.

Une fois n’est pas coutume et malgré le fait que j’éprouve une sympathie certaine pour le personnage, je vais faire ce que personne n’a fait avant moi, tenter de prendre de la distance et de rester pragmatique sur le cas Bielsa tout en essayant d’analyser les différents comportements extrêmes qui gravitent autour du personnage.

La culture involontaire du mythe

Et pour ça, on va commencer par le personnage lui-même, car force est de constater que Bielsa ne transpire pas la mesure et la retenue.

Il pousse les joueurs jusqu’à leurs limites, c’est un testard pas possible, il refuse de regarder les journalistes dans les yeux, il refuse de faire jouer Doria, il refuse de mettre Thauvin sur le banc, il ne changera jamais de système même après 4 raclées d’affilée… Il y a également certains éléments qui montrent qu’on à affaire à un personnage tout à fait singulier. La glacière, le café, la Bielsa-mobile… Des éléments symboliques d’un personnage sacré, comme le marteau de Thor ou le sabre laser de Luke Skywalker.

Même la saison de son équipe est à son image ! Extrême. Un jeu flamboyant qui nous a porté à la première place de Ligue 1 à la mi-saison, et une deuxième partie de saison ridicule dans laquelle on est 16^ème après la 34^ème journée…

Bielsa est premier ou dernier. Pas de demi-mesure.

Et il est le premier responsable des passions démesurées qui se déchaînent autour de lui puisque lui-même ne fait preuve de retenue que lorsqu’il s’exprime, ce qui est d’ailleurs un paradoxe intéressant puisqu’on a l’impression d’avoir affaire à un gars posé en conférence alors que tout dans son comportement indique l’opposé. Tout est extrême et passionné.

L’épineux cas journalistique

Le cas des journalistes est un peu particulier car biaisé par la recherche constante de « buzz » et de sensationnel, comme je le disais dans un précédent article. Par conséquent, il est toujours difficile de savoir si les articles et commentaires des journalistes sont sincères ou motivés par de vils desseins ce qui les rendrait caduques. L’un dans l’autre, l’extrémisme rejaillit.

D’abord qualifié de gars un peu simplet et marginal, il a ensuite été élevé par les journalistes au rang de génie du coaching pour finir par être trainé plus bas que terre à la moindre incartade.

Un match gagné ? Bielsa est le génie, l’élu qui apportera l’équilibre dans la L1.

Un match perdu ? Bielsa est surcoté, il est nul et sa méthode ne fait qu’user les joueurs.

Dans cette déferlante d’extrémisme, les gens oublient de réfléchir et de se poser 5 minutes. Pourtant, s’ils le faisaient, ils se rendraient tout simplement compte que Bielsa n’est ni un génie qui détiendrait la recette secrète du Football, ni un gros nul qui fait n’importe quoi sous couvert de formation originale.

Il est, comme la plupart des entraîneurs, quelque part entre les 2…

Je t’aime, moi non plus

Mais ce « quelque part entre les 2 » n’existe pas pour les gens, à commencer par les supporters qui ont eux-même tacitement créé 2 castes, les « pro-Bielsa » et les « anti-Bielsa » en oublient qu’on avait aussi le droit de se situer « quelque part entre les 2 ».

Les « pro-Bielsa » sont en adoration totale et très exagérée devant le personnage qu’ils élèvent au rang de messie du peuple marseillais. Ils lui écrivent un poème qu’ils lui donnent en conférence de presse, orné d’un petit cadre (De mémoire de supporter, j’ai jamais vu un truc pareil, on dirait des enfants qui offrent un collier des pâtes à leur prof à la fin de l’année…), ils chantent partout à sa gloire, ils mettent toute la responsabilité des défaites sur les joueurs et sur Labrune, ils le dédouanent de tout.

Les « anti-Bielsa », eux, font le contraire. Chaque faux-pas de l’équipe est imputable à Bielsa et uniquement à lui car c’est un tartuffe qui n’a jamais rien gagné, un gros nullard qui n’a jamais entraîné de grand club (La sélection Argentine, ça compte pas !), qui n’a jamais gagné contre les gros, c’est une buse qu’il faut très vite dégager car le vrai génie, Antonetti, attend.

Les 2 camps s’opposent et s’affrontent et au milieu, les quelques gars qui tentent de faire preuve d’un peu de pertinence et de recul sont noyés dans la masse. Bielsa, tu l’aimes ou tu le hais, c’est comme ça.

Mon avis, un avis de gars posé

Plus précisément, je suis un gars occasionnellement posé. Hier soir, pendant le fabuleux OM 3-5 Lorient, j’étais beaucoup moins posé bizarrement, mais les jours où je peux me permettre d’être posé et raisonnable, mon avis sur Bielsa est en fait très simple.

«L'effectif  idoine pour la méthode Bielsa n'existe pas»

Je pense sincèrement que Bielsa est un très bon entraîneur, un gars avec des idées originales et surtout, un point de vue « romantique » sur le foot, un point de vue qui se perd dans les débilités défensives de Ligue 1.

Je crois qu’il pense sincèrement que le foot est fait pour divertir et qu’il faut donc jouer l’attaque, régaler le public et se donner à fond, quitte à prendre des buts, c’est vraiment une façon de voir les choses rafraichissante dans notre Ligue 1 où tout le monde joue pour ne pas perdre.

Je crois aussi toutefois que sa méthode est quasi impossible à mettre en œuvre car elle nécessite un effectif exactement adapté à cette méthode-là. L’effectif idoine pour la méthode Bielsa serait composé, pas forcément de cracks techniques, mais de mecs prêts à se défoncer pendant 95 minutes et pendant toute une saison, jusqu’à en crever et des mecs avec un minimum d’intelligence, des mecs capables de prendre les clés du jeu parce que Bielsa laisse de la liberté à ses joueurs. Il ne leur dit pas toujours quoi faire quand ils reçoivent le ballon, surtout en attaque.

Dans le football moderne, cet effectif n’existe pas et encore moins en Ligue 1 où les joueurs ont tendance à être un peu feignasses et à se prendre pour ce qu’ils ne sont pas, c’est pour ça que dans tous les clubs où Bielsa est passé, sa méthode n’a marché qu’un temps, parce qu’elle lasse les joueurs qui ne sont pas prêts à mourir pour leur équipe.

Tant que Bielsa n’aura pas 11 Ayew ou 11 Heinze, il n’arrivera pas à exploiter tout son potentiel d’entraîneur, justement parce qu’il n’est pas prêt à faire des concessions, justement à cause de ce fameux extrémisme.

Ceci étant dit, si un jour et je le lui souhaite, un club lui donne 11 chiens avec une vision du foot et de l’attachement à un club un peu à l’ancienne, alors je pense sincèrement que cette équipe dominera le monde du football.

Épilogue :

PoF : « Voila... Alors, il est comment, mon article ? »

Kieros : « J'en sais rien, moi, je te dirai ça quand on aura des chiffres sur le nombre de vues...»

PoF : « ... »

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