OMForum présente officiellement ses hommages à Jean-Michel Aulas, qui a récemment quitté la présidence de l'Olympique Lyonnais.
LA GUERRE ENCORE, ON S'Y FAIT
Merci Jean-Michel, merci pour toutes ces années de saines rivalités.
Merci d’ailleurs d’en avoir fait une rivalité, alors que nous ne méritions probablement pas de tels égards. En réalité jamais au coude-à-coude, puisque tu as toujours été soit très au-dessus, soit très en dessous. Mais à chaque fois il a semblé que le dernier mot devait te revenir. Le titre de 2009 que tu nous enlèves, les places en ligue des champions que tu nous souffles. Même quand tu agresses un de nos joueurs, tu en ressors vainqueur sportif et victime morale. On ne peut pas dire que nos quelques victoires en Coupe, symboliques pour la plupart, équilibrent notre bilan famélique. Merci de nous avoir accueillis au royaume de tes adversaires quand la réalité du terrain ne l’exigeait pas. Dans ton propre intérêt, bien sûr, mais sans cette bataille des Olympiques, peut-être qu’il n’existerait plus que le tien.
Merci Jean-Michel, pour tes leçons de rationalisme économique. Merci de nous avoir enseignés l’EBITDA, l’actif joueurs, à une époque où nous raisonnions encore à l’affectif. Merci d’avoir rendu, par contraste, si désirable la médiocrité-signature de l’OM des années 2000. Celle qui fait qu’on n’échangera jamais une minute de Christian Gimenez contre une éternité de Juninho. Sans toi, l’arrivée de Vincent Labrune n’aurait apparu que comme un énième changement de gouvernance, c’est grâce à ton exemple qu’on a pu la lire comme une « nécessaire conversion à la modernité », pour singer la novlangue qui ailleurs prépare la saignée. Grâce à toi que l’on sait que notre Olympique se meurt dès qu’il se met à ressembler au tien.
TAPIE DANS L'OMBRE
Merci Jean-Michel, pour tes hommages posthumes au Boss. Merci de t’être emparé de son héritage et d’en avoir fait ta figure tutélaire. Les plus paranoïaques d’entre nous y trouveront de quoi alimenter le récit selon lequel ton règne est celui d’une tricherie légale, d’une déversion de ses méthodes dans les canaux des instances. Quant aux supporters parmi les plus fanatiques de « Nanard », ils devront vivre avec l’idée de partager un truc avec toi.
Merci, surtout, d’avoir fait de ton deuil un spectacle médiatique, comme s'il y avait un public pour tes états d'âme et tes larmes de crocodile. En mai 2020, alors que trop habitué à ce qu’ils soient des ordres tu vociférais tes désirs de reprise du championnat, devant un parterre de journalistes – certains tous justes sortis de réanimation – trop heureux de condenser tes postillons en propos vaguement intelligibles, il est 40 000 autres deuils qui trouvèrent moins de grâce à tes yeux. Merci d’avoir scellé in extremis la vérité qui aurait pu nous échapper, alors que se multiplient les hagiographies qui voudraient te réécrire en président populaire : qu’il n’y a rien qui sépare le président de l’OL et le PDG de Cegid, que vous êtes tenus par la même éthique, où l’humain n’a jamais été qu’une matière première, un actif à valoriser, un consommateur à capter, un locataire à déloger.
Nous aurions pu garder de toi l’image d’un adversaire coriace et valeureux, mais tu n’étais en fait qu’un simple chef d’entreprise. Merci avant tout, président, d’avoir pris soin de dissiper ce fâcheux malentendu. Alors que c'est Nanard qui t'accompagne vers la sortie, on espère que tu mesures ta chance : c'eût pu être Joëlle Aubron.