Saison 82/83, un gosse de seize ans fait ses débuts sur les pelouses italiennes. Il porte alors le maillot de Vicenza, club de C1 (l'équivalent de notre National.) Garçon timide et poli, on lui prédit un grand avenir eu égard à sa technique spectaculaire et sa vision du jeu proprement exceptionnelle pour un gamin de son âge. Sa troisième saison sous le maillot "vuoto e rosso" confirme les espoirs escomptés. Il joue pour la première fois une saison quasi complète et inscrit 12 buts pour autant de passes décisives. Le club monte en série b et Roby est recruté par la Fiorentina.
Le mythe commence.. mal. Il se blesse très gravement au genou et ne disputera aucun match de la saison. Un véritable cauchemar qu'il vivra avec une grande philosophie empreinte de la sagesse bouddhiste qui le caractérise. Il se fait opérer à St-Etienne

La Fiorentina a pris son mal en patience, elle a bien fait. Roberto Baggio explose à la face du Calcio et de toute l'Italie qui ne va plus tarder à succomber au charme irrésistible et au talent mirifique de ce joueur. Il inscrit 21 buts toutes compétitions confondues, révélant un don particulier pour les coups de pieds arrêtés.
Roby : Spécialiste mondiale de la petite lucarne.
Ses exploits fiorentins lui valent d'être appelé sous le maillot de la squadra en 88 face aux pays-bas. Il n'a alors que 21 ans.
En 90, après une finale de l'UEFA perdue avec la Fiorentina, Roberto Baggio rejoint la Juventus pour 100 millions de francs, record de l'époque. Sa renommée est à présent mondiale. Pourtant, le monde n'a encore rien vu.
Ses débuts en Coupe du Monde sont accomplis encore sur le banc mais ses rentrées sont décisives. Malgré son but face à la Tchécoslovaquie, Roby s'incline en demi-finale contre l'Argentine de son frère de jeu, Diego Maradona.
Pas grave, le mythe débute à peine. Ce que Roberto Baggio va accomplir ensuite sous le maillot de la vieille dame tient tout simplement de la légende. Les supporters trouvent enfin en lui, le digne successeur de Michel Platini. Meilleur buteur de la coupe des coupes en 91, il remporte la coupe de l'Uefa en 93 et inscrit la batelle de 21 buts en 27 matchs. Il est alors reconnu par tous comme le meilleur joueur du monde et voit sa réussite consacré par le suprême ballon d'or. Trophée qu'il revendra plus tard aux enchères pour donner l'argent aux victimes d'inondation de son pays.
En 94, Roberto Baggio est au sommet de sa carrière. La coupe du Monde aux Etats-unis le confirme. Il qualifie à lui seul la squadra en balayant de son génie le Nigéria, l'Espagne et la Bulgarie par un doublé historique. En Finale, face au Brésil de Romario et Bebeto, le destin cruel le choisit pour être le héros malheureux de la compétition. Son tir se perd dans le ciel azur. Avec lui, s'échappe le rêve du petit garçon de Caldogno. Roberto ne pleurera pas sur le terrain. Digne et droit, il reste debout, prostré dans une douleur inextinguible. Ce tir au but raté, il avoue du bout des lèvres. Il en fait encore des cauchemars.
L'avènement de Del Piero à la Juve le pousse inexorablement vers la sortie. Roby réalise une dernière saison en demi-teinte au cours de laquelle il conquiert toutefois le scudetto et la coupe d'Italie.
La blessure du mondiale est profonde, Roby quitte la Juve les larmes pleins les yeux et les supporters turinois réservent une ovation éplorée à leur idole.
Berlusconi ne tarit pas d'éloge sur sa nouvelle recrue. Pourtant les deux saisons qui suivent au Milan AC sont du même tonneau. En dépit de quelques coups de patte inspirés et d'un nouveau titre de champion, Roby n'est plus le même magicien qu'avant.
En 97, il part à Bologne. Loin des fastes du club milanais, il retrouve un peu ses valeurs. Il inscrit 22 buts en 30 matchs et souffle à l'occasion ses 30 bougies. Cette saison réussie lui vaut un transfert à l'Inter et surtout une sélection pour la coupe du monde en France. L'occasion pour lui de se réconcilier avec le passé. Hélas, il croise la route d'une France déterminée à briller sur ses terres. Roby a malgré tout sa revanche. Il ne tremble pas au moment d'affronter Barthez et inscrit son tir au but. Personne ne pourra plus jamais remettre en cause son courage.
En 2000, il remporte une autre coupe nationale mais Dino Zoff ne le convoque par pour l'euro. Déçu, il signe alors pour Brescia où il disputera quatre saisons honorables avec plus d'une soixantaine de buts.
Ce 16 mai, Roberto Baggio l'enfant chéri de l'Italie a donc tiré sa révérence. Il fait une dernière apparition sous le maillot de la squadra et abandonne les supporters, des rêves pleins la tête.
Auteur de 207 buts, riche d'un palmares qui d'avis de tous, aurait mérité d'être plus étoffé, Baggio figure à la troisième place des meilleurs tireurs de coup francs de toute l'histoire du Calcio devant Zico et Maradona. Plus que ses chiffres, il laissera le souvenir d'un grand professionnel, humble et respectueux, père de famille attentionné, qui évitait les frasques de la nuit chers à certains de ses collègues.
Le meilleur reste peut-être à venir pour lui. Ses qualités humaines et sa science du foot le prédisposent à une grande carrière d'entraîneur. Quoiqu'il en soit, le mot de la fin lui revient : "Il est trop tôt pour dire ce que je ferai après. Je dois d'abord m'habituer à l'idée de ne plus courir autour du terrain"

Ciao bambino !