24 juin 2003 - Christophe MICHEL
Le président de l’Olympique de Marseille, Christophe Bouchet a su, en un an de présidence, faire passer ses idées dans un style très direct. Il a même porté plainte contre la Ligue et la Fédération ! Pour cet ancien journaliste, l’OM doit retrouver son standing et cela passe par des réformes aussi bien dans son club qu’au niveau des structures du football. Faute de quoi, le football français sera à la traîne.
Rentrons dans le vif du sujet, la DNCG en appel a décidé mercredi dernier de maintenir l’AS Monaco en Ligue 1. Qu’en pensez-vous ?
La DNCG (direction nationale de contrôle de gestion) aurait rétrogradé Monaco si elle avait eu à le faire. Je ne connais pas le dossier mais la DNCG a toujours clamé son indépendance et elle a pris ses responsabilités. Encore une fois, Monaco et je me base là-dessus, c’est de la concurrence déloyale. Ce n’est pas un club de football, il n’y a pas de public, très peu de supporters, pas de diffusions. Je ne fais pas une fixation sur Monaco mais Monaco a les mêmes droits que autres clubs, c’est au niveau des devoirs que cela pose problèmes.
C’est-à-dire ?
La masse salariale joueurs de l’OM, c’est environ 20 millions, au PSG, c’est 25 millions et à Monaco, ça ne leur coûte que 20 millions rapporté à notre fiscalité alors qu’ils ont des joueurs avec de très gros salaires comme Simone et Gallardo. La fiscalité monégasque fait que les chiffres sont faussés. On ne va pas se battre sur le déficit de Monaco, d’autres clubs sont dans ce cas, il faut se battre sur cette concurrence déloyale qui tire vers le haut les salaires et qui fausse le jeu de la concurrence.
Que faut-il faire ?
Il faut que Monaco ou quiconque ait les mêmes conditions générales que les autres. Faut-il que ce soit Monaco qui fasse un pas vers nous ou nous un pas vers Monaco, j’en sais rien mais si Andorre jouait en Ligue 2, il faudrait qu’Andorre s’aligne sur les mêmes conditions que les autres sur la façon dont ils payent leurs charges.
<span style='font-size:25pt;line-height:100%'>« C’est nous, patrons de clubs, qui sommes au cœur du système » </span>
C’est principalement l’aspect financier qui vous gêne ?
Bien sûr, ils ne vont en plus jouer à quinze et avec trois gardiens !
Que peut faire la Ligue dans le cas présent ?
Le courage n’étant pas la vertu partagée à la Ligue, on va repartir comme d’habitude. L’UCPF (union des clubs professionnels de football) est concernée mais bon... Les collègues en privé sont toujours prêts pour faire quelque chose mais cela ne va pas vite quand il faut agir. Campora à de l’aplomb mais en face…
Y a t-il un consensus sur Monaco à l’UCPF ?
Pour l’instant, je ne sais pas trop mais il faudrait le faire. Le plus vite possible sûrement.
Le président de la LFP, Frédéric Thiriez, a essuyé un franc revers lors du dernier Conseil d’Administration principalement sur la refonte du championnat. Pensez-vous qu’il est en difficulté ?
L’UCPF prend du poids et c’est logique car c’est lui qui est centre du système. On est d’accord que pour jouer au football, il faut des terrains, un ballon, des joueurs, il faut une organisation. Ce sont les clubs qui payent tout ça. Je parle de football professionnel et pas de football sur la plage avec deux tee-shirts pour faire les buts. Il s’agit d’agir dans les respect des joueurs, des éducateurs mais c’est nous qui sommes au cœur du système.
Quels sont vos rapports avec le président de la LFP ?
Dans le dossier des droits télés, il a plutôt été correct. Il a fallu quand même arriver à certaines extrémités pour se faire entendre mais je suis encore trop jeune pour juger comme me le dit Jean-Michel Aulas !
<span style='font-size:25pt;line-height:100%'>« Le système du football est médiocre »</span>
Pour revenir à Marseille, comment vont vos finances ?
En 2004, j’aurai diminué les salaires à tous les niveaux et du mieux que je peux. Si on ne se bat pas, on ne fait rien dans le foot. La saison qui vient ne sera pas bonne sur le plan financier. Franchement, l’introduction en Bourse, nous on s’en fout, on n’est pas dans les clous. A l’OM, il faut tout améliorer mais l’année 2004-2005 sera meilleure. La nouvelle répartition des droits télés nous sera plus favorable à hauteur de 20M€ si on finissait cinquième contre 11,5 cette saison. De plus, notre contrat signé avec Adidas prendra effet à cette date et nous assurera des revenus, de l’ordre de 7,5 M€ par an, et puis les « gros » contrats qui plombent les comptent arriveront à échéance à ce moment-là.
Quel bilan tirez-vous de votre année de présidence ?
Ce n’est pas à moi de le faire mais il y a du travail à tous les niveaux et tout s’est amélioré dans tous les secteurs. Ce n’est pas le moment de se retourner et de se dire, « oui, c’est bien, tout va bien ». Il reste encore des pentes à gravir, quand on sera arrivé au col, on verra.
Que pensez-vous du football en général ?
J’ai la vision d’un système qui est médiocre. La Ligue fonctionne de façon archaïque. Ce qui est assez positif, c’est que beaucoup en sont persuadé, il faut juste un appuyer sur la pédale. Le milieu du football, il est comme les autres, le football a ses spécificités, c’est tout. C’est le système qu’il faut revoir.
Un mot sur la loi sur le sport ?
On tourne en rond avec cette loi. Elle n’est pas conforme à ce qu’on demandait. A l’évidence, elle n’est pas faite pour le sport professionnel. Je défends un métier car le football est devenu un métier. Pourquoi ce métier ne serait pas considéré comme un vrai métier ? Quand deux gars démarrent une start-up dans une chambre de bonne, ils lèvent 10 millions d’euros en Bourse et on empêche Aulas de changer sa société pour la faire devenir concurrentielle ! C’est n’importe quoi.

