Bouchet pète les plombs
Après avoir remis Marseille sur des bons rails, tant sportivement que financièrement, après avoir fait plier la Ligue et Adidas, Bouchet croit qu'il peut maintenant tout se permettre. Mais ses propos outranciers concernant le titre de 93 ou la situation financière de Monaco nous laissent penser qu'il a maintenant besoin de vacances...
L' O.M. aurait pu devenir le Real français
Le 26 mai 1993 à Munich, lorsque Basile Boli, d'un coup de tête rageur, donne la victoire à son équipe, c'est toute la France qui chavire de bonheur. Marseille gagne la Ligue des Champions, la première et toujours la seule jamais gagnée par un club français. L' OM est alors au sommet. Le club phocéen écrase le football de l' Hexagone depuis cinq années et il est maintenant sur le toit de l'Europe, et surtout, il jouit d'une popularité énorme dans tout le pays.
Marseille est en passe de devenir le Real Madrid français, c'est à dire un club possédant un solide palmarès, un véritable statut européen, et des admirateurs parmi tous les vrais amateurs de football. A cette époque, tous les gamins de France portent des maillots ciel et blanc floqués aux noms de Waddle, Papin, Boksic ou Pelé. Bien sûr, le populisme de Tapie ou la rugosité excessive de Mozer énervent un peu, mais le jeu chatoyant et spectaculaire des attaquants marseillais, ainsi que la solidité défensive de l'équipe, font l'unanimité (sauf peut-être chez quelques fanatiques du PSG).
Et soudain, tout s'écroule. L'affaire OM-VA éclate et éclabousse tout le football français. Des sanctions juridiques et sportives sont prononcées et font chuter Marseille de son piédestal. Mais le plus grave, c'est que cette tentative de corruption va jeter un voile définitif de suspicion sur tout le parcours marseillais, y compris sur la belle victoire en C1. Avez-vous remarqué comme l'anniversaire des dix ans de ce succès historique a peu été fêté dans les médias ou par la Ligue ? On ne souhaitait sans doute pas refaire tinter la casserole qui y était attachée. C'est pourquoi Marseille n'est pas (encore ?) devenu le Real français.
Bouchet bafoue la morale sportive
Christophe Bouchet, Président de l'Olympique de Marseille, a décidé de fêter cet anniversaire à sa façon. Pris d'une soudaine crise de démagogie et de cynisme, le voilà qui réclame la restitution à l'OM du titre de Champion de France 1993. Il parle d'un titre "remporté sur le terrain" (sic!), d'une "cicatrice honteuse" (alors, pourquoi la rouvrir ?) et estime que le club a assez payé. Même si tout le monde n'est pas d'accord (les passionnés de l'OM, ce que l'on peut comprendre), il faut réfléchir et analyser quand même avec un minimum d'objectivité. Les propos sont navrants dont le seul résultat est d'attiser les haines et de faire plaisir aux supporters les plus extrémistes qui continuent de comptabiliser ce titre dans le palmarès de l'OM (extrait du site officiel de l'Olympique de Marseille: "l'OM des années Tapie va faire mieux encore [que l' ASSE] trustant la première place au classement cinq années d'affilée pour porter le "score" olympien à 10 sacres" [Ils comptent aussi le titre de Champion de France amateur de 1929]).
La corruption est le pire fléau du foot, pire que le dopage ou la violence. Avec la corruption, les compétitions n'ont plus aucune valeur si ce n'est celle du fric. Les sanctions contre Marseille ont été justes. Peut-être a-t-on voulu faire un exemple mais c'est un exemple nécessaire. Si on revient maintenant dessus : c'est comme si on donnait un grand encouragement à tous les escrocs du sport. Non ? Historiquement, si le titre n'a pas été donné alors au Paris Saint Germain, arrivé second au classement, ce fut sans doute par souci d'apaisement, mais surtout pour laisser à l' OM la possibilité de récupérer son bien au cas où la justice civile, toujours plus lente, prononcerait un non-lieu. On sait que ce ne fut pas le cas. L'affaire a été donc close.
Grosse fatigue ou tactique délibérée ?
On pouvait penser que le dérapage de Bouchet était du à une grosse fatigue et qu'il s'en tiendrait là. Mais il a récidivé et il semble malheureusement qu'il s'agisse d'une tactique de pression tous azimuts contre les instances nationales, exercée dans le but d'obtenir quelques avantages pour son club et de devenir l'un des personnages incontournables du football français. Depuis une semaine, Bouchet tire ainsi à boulets rouges contre Monaco, remettant en cause la participation de cet "état confetti" au Championnat de Ligue 1, l'accusant de "concurrence déloyale", de subventions déguisées et de "prendre une place européenne aux clubs français" après l'avoir déjà accusé d'immoralité pour l'achat d'une "ribambelle de joueurs entre 12 et 15 ans".
A l'exception du dernier point, qui n'est pas prouvé, Bouchet a cette fois sans doute raison sur le fond. C'est vrai que le club monégasque dispose d'une fiscalité plus qu'avantageuse et qu'il est largement soutenu par la famille princière, ce qui lui donne un avantage financier important sur ses concurrents français. C'est également vrai que ses comptes, sur lesquels se penche actuellement la DNCG et qui lui vaut une rétrogradation provisoire en Ligue 2, comportent des zones d'ombre. Mais si le problème méritait d'être posé, pourquoi le faire avec tant de haine et d'esprit partisan ? Bouchet, ancien journaliste reconverti, grisé par sa réussite présente, semble avoir perdu toute mesure. Décidément, le fair-play semble une valeur fortement en baisse dans le milieu du foot professionnel ! Monaco n'est-il pas un club qui hausse le niveau du championnat, et apporte à notre championnat, une crédibilité supplémentaire par rapport aux pays étrangers ?
"Aulas est exceptionnel, c'est un exemple à suivre"
C'est ce qu'affirmait Christophe Bouchet il y a quelques mois, souhaitant suivre les traces du président lyonnais pour reconstruire à Marseille un grand club. Appliquant la méthode Aulas, faite de travail et de rigueur, Bouchet s'est d'abord entouré de fidèles et a commencé à mettre en place des structures solides. Le déficit budgétaire, estimé à 27 millions d'euros en début d'année est en bonne voie d'être comblé. Sur le plan sportif, il a donné toute sa confiance à Alain Perrin, un des meilleurs techniciens français, et celui-ci le lui a bien rendu en obtenant une place sur le podium du Championnat, et surtout, une qualification pour la lucrative Ligue des Champions.
De façon plus discutable, Bouchet, comme Aulas, est un adepte de l'ultra-libéralisme et du lobbying forcené. Son bras de fer avec la Ligue, contre laquelle il a porté plainte au mois de mars, lui a permis d'obtenir une nouvelle répartition des droits TV, qui tient compte du nombre de diffusions, et qui assure donc à l' OM, club le plus diffusé, des revenus supplémentaires. De même, oser mettre en concurrence Adidas, entreprise historiquement liée avec Robert-Louis Dreyfus, lui a permis de renégocier à la hausse le contrat passé avec l'équipementier. On parle de 75 millions d'euros sur dix ans. C'est toujours ça de pris !
Malheureusement, ces succès ne lui suffisant pas, Bouchet a également décidé de suivre Aulas dans ce qu'il a de plus détestable, les outrances verbales. Mais dans ses dérapages, l'élève a dépassé le maître, et par la même occasion, les limites de la morale et de la correction.
Pour encore grandir, le football français a besoin de présidents qui savent tenir un budget et préparer l'avenir, sans toujours remettre en cause les choix sportifs des techniciens qu'ils ont nommés. Bouchet, comme Aulas, sont de cette trempe. Cela nous change des figures folkloriques que l'on voit dans d'autres clubs. Mais qu'ils n'oublient jamais qu'ils travaillent dans un domaine, le sport, où l'exemplarité est une valeur primordiale. Allier business et esprit sportif, c'est possible !
A bientôt pour une nouvelle édition du billet de Carl !
Réagir à cet article - Par Carl Antoni
Ma réponse à réagir:
"Bonjour,
Suite à votre article sur Bouchet, je vous trouve pas assez objectif.
Au lieu de reconnaître que Bouchet effectue un bon travail de redressement au sein du club (climat plus favorable, organisation de l'équipe dirigeante bien huilée, résultats financiers meilleurs,...), vous n'affichez que le négatif (à part son avis sur Monaco), vous faites en sorte qu'on se retourne contre Bouchet.
C'est vrai que cela pourrait déranger certaines personnes, mais il faut reconnaître que le niveau de jeu en France s'est écroulé depuis qu'on favorise le partage, alors que le reste de l'Europe grandit à grande vitesse sans que leurs petits clubs soient lésés. C'est pour cela que Bouchet passe à l'attaque, il n'a pas perdu son sens du journalisme, au contraire, il s'en sert très bien pour prendre du recul nécessaire, ce que n'auraient pas eu les présidents précèdents.
Par rapport à la cicatrice, vous indiquez que Bouchet n'aurait pas du la reouvrir. En fait cette cicatrice est mal fermée pour les marseillais. Vous ne ressentriez peut être pas la même chose car vous ne seriez pas pas supporter de l'OM.
Bien merci.
Pascal"
Qu'on touche plus à mon Boubou !
