U17 CHAMPIONS DE FRANCE | Thiery "il faut faire monter les jeunes à dose homéopathique"

Eric Thiery est l'entraîneur et le formateur qui a amené ces deux générations 91 et 92 au titre de champion de France pour la première fois de l'histoire du club. Entraîneur au club entre 1987 et 2014, il a donc vu passer entre ses mains tous les joueurs du centre de formation de l'OM depuis presque 30 ans.

L'éducateur a entraîné les poussins pendant 8 ans, de 1987 à 1995, puis les moins de 13 ans pendant six ans et les 14 ans fédéraux durant cinq saisons et finit son cycle à la préformation. En 2007, il finit en tête de son groupe pour la première fois pour l'OM depuis longtemps et devient alors le coach des 16 ans nationaux. Après les deux titres de 2008 et 2009, il récidive presque avec la génération 94 qui arrive en finale en 2011 mais perd contre le PSG lors de la revanche de la finale de 2008.
En 2012, il prend les rênes de l'équipe réserve en CFA2, et rate la montée en CFA à la différence de buts lors de sa première saison. Malheureusement, suite aux résultats moyens de la réserve la saison suivante, il quitte le club en janvier 2014 dans le cadre d’un changement de projet et d’hommes. Il est sans club depuis son éviction et nous a fait partager un moment plein d'authenticité et d'émotion concernant ces deux générations.

Thiery

Bonjour Éric, comment vas-tu ? Que s'est-il passé lors de ton départ en 2014 de l'OM ?
Je vais bien merci. Tout simplement, suite aux résultats difficiles et au changement de projet, j’ai dû quitter le club.

Quels sont les souvenirs principaux que tu gardes des deux épopées de 2008 et 2009 ?
La première année en 2007- 2008 a été une surprise pour tout le monde. L'OM s'est lancé dans une nouvelle politique de formation, avec une manière différente de travailler. De plus, personnellement, j'étais totalement dans l'inconnu, car c'était la première fois que j'entraînais cette catégorie de jeunes, les 16 ans nationaux. Je ne connaissais pas du tout le championnat que j'ai découvert cette année là. J'ai tout de suite eu de très bonnes interactions avec les jeunes qui ont très bien travaillé, que je connaissais déjà de la préformation. J'ai également un excellent souvenir de ma collaboration avec un staff compétent et dévoué. Cela a été un énorme travail de fond et une belle aventure humaine.

Cette équipe était très solide défensivement, et était composée de quelques 1ère années comme Florian Moulet ou Boris Nkoa. On était dans le trio de tête toute la saison, sans garantie de faire les phases finales. Finalement, on finit meilleur second.

En fait, lorsqu'on s'est qualifiés pour les phases finales, on ne savait pas trop où on mettait les pieds. Contre Bordeaux, Sochaux et Nantes, nous avions affaire à des centres de formation connus et reconnus, alors que de notre côté nous avions tout à prouver dans ce milieu. D'ailleurs nous avons été la cible de quolibets de la part de ces équipes lorsqu'elles nous ont vu arriver, elles nous ont pris de haut mais à la fin du tournoi elles ne rigolaient plus. C'était quelque chose de très satisfaisant de voir le travail effectué cette saison porter ses fruits si rapidement. Les joueurs ont su relever le défi et répondre présents. On finit donc premier de notre groupe avec une équipe très solide. Cette solidité a été la force de ce groupe durant tout le championnat jusqu’aux phases finales.

L'année suivante en 2008-2009, c'était très différent, on savait où on allait. Le groupe était équilibré et homogène et nous avions bien travaillé toute l’année. De plus, certains avaient l’expérience de l’année précédente. Nous avions vraiment bien bossé toute l’année.

Sais-tu ce que ce sont devenus tes anciens joueurs ? Y'a-t'il des évolutions qui t'ont particulièrement surpris (en bien ou en mal ?)
Cela est difficile, dommage que ces générations n’aient pas réussi à s’imposer au plus haut niveau. J’ai encore des contacts avec certains d’entre eux. Je me tiens au courant de ce qu’ils deviennent. Pour les éducateurs que nous sommes, c’est dur de voir des jeunes en difficulté.

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Pourquoi si peu d'entre-eux ont réussi pour l'instant ?
L’effectif professionnel était beaucoup plus étoffé à l’époque avec des enjeux sportifs très exigeants comme la ligue des Champions. C’était très compliqué à l’époque pour un jeune de faire sa place. Maintenant le groupe professionnel est plus restreint et les espoirs ont donc un peu plus de place pour s'exprimer. Les jeunes avaient des fenêtres d'opportunités très minces durant cette période pour se montrer, c'était donc très dur pour eux de se mettre en avant aux yeux du staff pro. Vous rajoutez à ça le faible pourcentage de jeunes qui arrivent au bout dans le milieu du foot...

Un joueur champion de France U16 a 100 fois les capacités de jouer en CFA2. Au minimum d'ailleurs, il doit jouer à ce niveau-là et beaucoup de joueurs 91-92 auraient pu apporter au club en CFA2. L’objectif du formateur est de les aider à atteindre ce niveau. La CFA2 est le vase communicant, la transition qui permet de s’aguerrir pour atteindre le monde pro. La différence est énorme et il faut faire monter les jeunes à dose homéopathique pour leur permettre de sortir du football espoir. L’important n’est pas d’être bon à 17 ans. Il faut également canaliser leur impatience et leur apprendre à gérer les moments difficiles, les échecs et encaisser tout ça.

Autre difficulté, à l’OM, l’entraîneur de l’équipe pro a une durée de vie limitée, donc on ne peut pas garder le même système dans chaque catégorie de jeunes jusqu’à l’équipe 1 comme cela est le cas dans certains clubs comme Auxerre ou l’Ajax. A l’OM, il faut que les jeunes s’adaptent et cela est difficile. De plus, il y a une constante qui est la recherche du résultat à court terme. La gagne fait partie de l'ADN du club et il faut leur inculquer. On m'a parfois reproché de privilégier un peu le résultat aux dépends du jeu. Le jeu est important mais sur certains matchs, il faut savoir s'adapter à l'adversaire lorsqu'il est plus fort et apprendre aux jeunes à gérer cette situation.

Est-ce que tu suis toujours l'OM ? Tu penses quoi de l'équipe de cette année ?
Bielsa effectue un travail de qualité avec les jeunes. C'est un entraîneur qui aime le foot dans sa globalité. Il suit les équipes de jeunes, il se déplace, va voir jouer les U19, la CFA2. Il est donc encore plus facile pour les jeunes du club de se mettre en avant, d'avoir une chance de jouer, d'exprimer leurs qualités. Il y a une certaine émulation au sein du centre actuellement car les jeunes sentent qu'ils peuvent avoir leur chance en équipe 1 et même plus d'une fois.
Cela aurait été un plaisir de travailler avec un entraîneur reconnu internationalement et qui s’intéresse aux jeunes. Cela fait plaisir de voir ces derniers avoir leur chance.

Quels sont tes projets maintenant ? Tes défis ?
Je suis actuellement sans club depuis mon départ de l'OM. Aujourd'hui, je recherche un projet qui corresponde à mes attentes. Cela pourrait vouloir dire par exemple faire partie d’un staff, m'inscrire dans un projet intéressant.

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