Anigo : "Trois joueurs de grand standing"
Publié le lundi 1 juin 2009 à 14H11
Le mercato ouvre le 9 juin, José Anigo évoque le recrutement sur lequel il travaille avec Didier Deschamps
L'une des grandes fiertés de José Anigo, est d'avoir su, aux côtés de Pape Diouf, instaurer une stabilité à l'OM, qui lui permettra de disputer la Ligue des champions pour la troisième année consécutive.
Pour José Anigo, la saison prochaine a déjà commencé. Bien avant que celle-ci ne s'achève. Avec calme et lucidité, il s'est mis au boulot avec Didier Deschamps pour permettre à son club de conserver la dynamique qui a mené l'OM à la deuxième, à la troisième, puis de nouveau à la deuxième place au cours des trois dernières saisons. En cherchant à monter enfin sur la dernière marche dans un an.
- José, comment vivez-vous cette fin du championnat à la deuxième place ?
José Anigo : Comme une déception, parce que notre ambition n'est pas d'être numéros deux. Mais pas comme un échec. Nos objectifs de construction du club sont atteints; l'OM bénéficie d'une grande sérénité qui permet de construire, ce n'était pas possible il y a cinq ans.
Nous devenons un vrai club, ce qui permettra d'avoir une grande équipe dans les années à venir.
- Avec Pape, vous vous sentez maudits ? Finale de l'UEFA en 2004, finales de coupe de France en 2006 et 2007, puis cette fin de saison...
J.A. : Dans la vie, on a ce qu'on mérite. Si nous finissons deuxièmes, c'est que nous ne méritions pas d'être champions. Ce n'est pas la faute aux arbitres, même si nous n'avons pas été avantagés, à Bordeaux ou au Mans. Mais nous avons perdu trop de points à domicile. Personne ne nous a volés quand nous perdons 3-0 contre Nancy, ou lors des contre-performances contre Toulouse et Lyon. À l'extérieur, nous avons fait un parcours hors norme, pas à la maison...
- Cette absence de titre ne permet pas de valider le boulot de fond qui a été accompli...
J.A. : Le public dira toujours : oui, mais l'OM n'a rien gagné. Je comprends. Mais aujourd'hui, on n'a plus honte de l'OM; honte, le mot est peut-être fort, mais on ne parle plus de gabegie, de débilité profonde, de grand n'importe quoi. Dans le milieu du foot, les gens qui font le même métier que nous savent que nous sommes sérieux, ça c'est une belle victoire. Trois années de suite en Ligue des champions, ça permet au club de grandir et ça fournit aux gens un autre spectacle que la L1. Ils veulent gagner, mais nous aussi. Et pour gagner, il faut passer par certaines étapes, comme l'a fait Lyon.
- Bernard Lacombe vous a justement rendu hommage...
J.A. : C'est un exemple. Auparavant, on riait de Marseille, en parlant d'instabilité chronique. Aujourd'hui, il n'y a plus cette caricature.
Depuis trois semaines, vous travaillez dans l'ombre avec Didier Deschamps. Ça va changer... Maintenant, nous allons oeuvrer à découvert, c'est mieux. Quand on finit deuxième, il y a une base; Didier a son projet en tête, il a évalué les forces et les faiblesses de l'équipe au fil de la saison; nous allons pouvoir travailler sur les points qu'il entend améliorer. Non pas en prenant dix joueurs, mais trois ou quatre de grand standing, ce qui limite les chances de se tromper.
- Dans quelles zones ?
J.A. : Depuis deux ans, nous cherchons à renforcer notre défense centrale, avec un ou deux éléments. Nous devons doubler certains postes, prendre un milieu relayeur, un attaquant de plus, et deux ou trois joueurs de complément.
- Garder Niang et Taiwo, ça fait déjà partie du recrutement ?
J.A. : Oui. C'est logique et cela découle de notre participation régulière à la Ligue des champions. Quand tu n'y es pas, pour l'équilibre financier, tu es obligé de vendre tes meilleurs joueurs. Tu te renfloues, mais tu t'affaiblis. Maintenant que nous pouvons tenir la route financièrement, il serait idiot de s'affaiblir. Donc Taiwo, Niang, Mandanda, Cheyrou ne partiront pas; Cana non plus. Et d'autres... Didier a son organisation dans la tête et des joueurs cadres qu'il ne veut pas voir partir.
- Vous ne conservez pas les joueurs en fin de contrat (M'Bami, Zenden) ou prêtés (Wiltord, Mears). Mais on est étonné pour Civelli, qui est une réussite du club...
J.A. : Renato n'est pas encore parti; les discussions vont avancer avec son agent et lui. Nous verrons ce que veut faire Didier. Renato est le seul qui a une chance de rester.
- Parmi les joueurs sous contrat, qui est susceptible de partir ?
J.A. : Je suis du même avis qu'Éric au sujet de Zubar. Il a un potentiel énorme. Malheureusement, il y a eu des faits de jeu, dont il est le seul responsable, qui ont freiné sa progression. Je pense qu'il vaut mieux le vendre pour qu'il s'épanouisse à l'extérieur. Quand un joueur est pris en grippe par le public, il ne peut plus avancer, il vaut mieux qu'il joue ailleurs. Comme Samassa.
- Et Hatem Ben Arfa, peut-il faire comme Ziani ?
J.A. : Il est pétri de talent mais doit le prouver au moins par quinze ou vingt matches de très haut niveau où il nous fait gagner. Il a joué de façon irrégulière, comme un jeune qui touche au monde pro; il est en train de grandir. Didier pourra en parler mieux que moi. Il a découvert un club, un environnement qu'il ne connaissait pas et s'est aperçu que le moindre dérapage prenait des proportions surdimensionnées. Il a du talent, il a tout, mais ça ne suffit pas. Ce tout doit être mis en avant pour le bien de l'équipe. Nous y croyons...
- Champion ou dauphin, ça fait une différence pour recruter ?
J.A. : Non. Quand tu es champion, tu te mets encore plus de pression. La vraie différence, c'est de disputer la Ligue des champions. Dans la tête d'un joueur, c'est la plus belle vitrine en Europe et ça conditionne tout...
- Vitrine ! C'est triste d'entendre ça : l'OM n'est finalement qu'un tremplin...
J.A. : Combien de joueurs ai-je vu prendre notre maillot, embrasser l'emblème et, trois mois après, dire qu'ils voulaient partir? Les joueurs sont à l'image de la société actuelle, ni meilleurs, ni pires. Mais dans ce lot de joueurs, merci mon Dieu! Nous en rencontrons encore qui ont de vraies valeurs. Je ne citerai pas leurs noms mais vous les connaissez...
- Il est vrai qu'avec des gens comme Julien Rodriguez, Bolo Zenden, Laurent Bonnart, Benoît Cheyrou ou Lorik Cana, vous avez fait des choix excellents...
J.A. : Nous, dirigeants, avons progressé aussi. Par le passé, les gens ne restaient pas longtemps et ne construisaient pas. Notre fierté, avec Pape, serait qu'un jour, nos successeurs s'assoient dans nos fauteuils et n'aient pas grand chose à faire, parce que nous aurons laissé quelque chose de solide. Un grand club, c'est ça: les hommes partent, la structure reste. Selon moi, avec Pape, l'OM a son meilleur président depuis... des décennies. Et j'en ai vu passer...
- Le nom de Didier Deschamps est-il aussi un argument dans le recrutement ?
J.A. : Évidemment ! Il a été le capitaine de la seule équipe française à avoir remporté la Ligue des champions, de l'équipe de France qui a gagné la coupe du monde. Comment penser que cet homme-là ne va pas être important ? Qui pouvait passer après Éric Gerets ? Pas n'importe qui...
Par Mario Albano