BASKET | Russell Westbrook ou l'importance des statistiques

BASKET | Kobe974, membre de la section basket d'OMForum, revient en stats sur la saison NBA de ce sport étrange où on met les mains au panier.

Russell Westbrook (RW pour les intimes) a fini la saison régulière en triple-double (TD). Loin de se satisfaire de ce seul exploit, il a également battu le record du plus grand nombre de triples-doubles (TD), avec un total de 42. Mais au fait, c'est quoi un triple-double ? En quoi le contexte de cette saison joue-t-il grandement en la faveur de RW ? On reviendra également sur la question qui anime le microcosme de la NBA depuis quelques semaines : qui de James Harden ou de RW finira MVP ? Puis nous reviendrons sur quelques triples-doubles que l’animal a lâchés proprement cette année.

 

Triple-double, pour quoi faire ?

 

Pour toi jeune lecteur(trice) peu habitué(e) au monde de la balle orange, tu te demandes probablement ce qu’est un triple-double et pourquoi ce record (et cet article) existe. Tout d’abord, une petite précision concernant les anglo-saxons : ils sont grandement tournés vers l’analyse des chiffres, et sont beaucoup plus factuels et friands de statistiques que nous. Pour une analyse plus complète du TD, je conseille cet excellent billet sur le blog de BasketUSA.

Cette rapide introduction faite, répondons désormais à la question : un triple-double consiste à cumuler plus de 10 unités (d’où le double pour Double figure in english dans le texte) dans trois (d’où le triple) catégories statistiques parmi les suivantes (en NBA) : points, rebonds, passes décisives, interceptions, contres.

Dans la quête du triple-double, marquer 10 points n’est pas l'objectif le plus difficile (1 seul triple double a été réalisé sans les points dans TOUTE l’Histoire de la NBA). En revanche, réussir à prendre plus de 10 rebonds ou à faire plus de 10 passes (le triple-double le plus courant) n’est pas donné à tout le monde, de par les spécificités du jeu ou des joueurs (les intérieurs ne font pas de passes, les meneurs sont trop petits pour prendre les rebonds). Malgré tout, le triple-double est en moyenne plutôt l'affaire des meneurs, les interceptions et les contres ne participant que très rarement à un TD. Pour la culture, le classement des joueurs avec le plus grand nombre de TD en carrière est le suivant : Oscar Robertson (181), Magic Johnson (138), Jason Kidd (107).

 

Le contexte NBA, un accélérateur de performance?

 

Maintenant que l’on possède une idée plus claire de l’importance des stats en NBA et de la définition d’un TD, permettez-moi ce petit rappel historique concernant la NBA de ces dernières années.

Les 2 dernières finales NBA, pour couronner la meilleure équipe du monde, ont opposé les Golden State Warriors de Stephen Curry et leur basket fait de mouvements, d'arrogance et de tirs à 3 points, aux Cleveland Cavaliers, mené par Kyrie Irving et Lebron James, l’un des meilleurs joueurs de NBA de tous les temps (pour les puristes, ceci est une hérésie). Le jeu des Cavs s’articule principalement autour de la capacité de Kyrie et de Lebron a créer du jeu et des décalages (pour des tirs à 3 points). Voyant le succès de ces équipes, le jeu de la NBA se porte désormais de plus en plus sur le tir à 3 points, au détriment du jeu intérieur old school des 90’s notamment.

Ajoutons également dans le contexte NBA le départ avec pertes et fracas du meilleur joueur du Thunder d’Oklahoma City (anciennement Seattle Supersonics RIP snif) Kevin Durant (KD) pour les Golden State Warriors. Ce départ a créé un séisme dans le monde de la NBA, les Thunders passant à 12 minutes d’éliminer les Warriors durant les derniers playoffs, et le départ du meilleur joueur d’OKC pour les Warriors a relancé l’éternel débat des joueurs qui préfèrent quitter leur club plutôt que de se battre encore plus pour réussir. Mais que vient donc faire RW dans cette affaire ?

 

Russel WHOestbrook ?

 

Drafté en 4ème position par OKC en 2008, Russel Westbrook est un meneur de jeu connu pour son style, que l’on pourrait qualifier de foufou, à l’inverse d’un Curry basé sur l’élégance et le tir. Il faisait partie de l’équipe d’OKC qui s’est inclinée en finale NBA en 2012 contre...Lebron James et le Miami Heat. On notera que cette équipe de OKC était principalement constituée de Westbrook, Durant (tiens tiens) et James Harden (tiens tiens pour le futur de cet article)... Doté d’une grande explosivité et d’une bonne finition près du cercle au détriment d’un tir extérieur fiable (31% en carrière à 3 points), il a longtemps été considéré par les observateurs comme un lieutenant de KD (Kevin Durant), notamment à cause de son jeu ultra-spectaculaire, ce qui implique un grand nombre de balles perdues (5.5 cette saison).

On a souvent prêté au tandem KD/RW bon nombre de brouilles sur qui devait être LA star du Thunder. Alors querelles d’égo vraies ou pas, ce sont 2 joueurs totalement différents, la personnalité des 2 hommes étant même diamétralement opposée : calme et posé, soyeux et discret pour KD, extravagant (jusque dans les tenues pré-game), passionné et exubérant pour RW.

C'est pour toi, KD.

Suite au départ de KD, RW a enfin les rênes de l’équipe, et peut faire ce qu’il veut, il a carte blanche pour jouer son jeu à fond, il est le leader incontesté de l’équipe. Et cette équipe (qui a quand même perdu le MVP de la ligue en 2014 !) va s’appuyer sur son nouveau shérif pour déjouer les pronostics et finir à la 6ème place de la très relevée conférence Ouest et donc se qualifier pour les playoffs.

 

MVP or not MVP

 

Jusque là, on a vu donc qu’avec son jeu plutôt à contre courant, qu’avec le départ de KD pour les Warriors, RW possède donc toutes les cartes en mains pour exploser. Et le bougre le fait plutôt bien : sur 81 matches, il en est à déjà 42 triples doubles ! Le record sur une saison (détenu par Oscar Robertson) est battu. Il n’est pas rassasié car il va réaliser la deuxième saison de l’histoire avec un triple-double de moyenne, exploit que l’on pensait impossible à réaliser (sauf pour certains). En chiffres, cela donne donc 42 triples-doubles, 7 matchs où il a manqué un rebond ou une passe pour en valider un nouveau, 2 séries de 7 TD consécutifs, une moyenne de 31.6 points, 10.7 rebonds et 10.4 passes décisives [1].

Le titre de MVP, voyons voir cela.

À titre de comparaison : en 2014-2015, il y a eu sur l'ensemble des matchs de la saison, en tout et pour tout 46 triples-doubles. Soit seulement 4 de plus que le total du seul RW cette saison !

Il arrive à faire gagner son équipe (seulement 9 défaites lors d’un TD), alors qu’il y a clairement moins de talent dans son équipe que les années précédentes. Suffisant pour faire de lui le MVP (meilleur joueur) de la saison ?

Son principal concurrent est James Harden (a.k.a el barbudo), son ancien coéquipier qui quant à lui compile malgré tout 21 TD, en sus de ces 29.2 points, 8.1 rebonds et 11.2 passes décisives.

La question est donc de savoir qui du barbu ou du « bourrin » va finir MVP. Personnellement, bien que je n'apprécie pas forcément le joueur, mon avis est qu’emmener en playoffs une équipe composée de Semaj Christon, Nick Collison, Jerami Grant ou Andre Roberson serait déjà suffisant pour figurer dans le top 5. Si l’on ajoute la saison en triple-double, et certaines performances comme celles détaillées plus loin, je crois que ma réponse est assez claire : on reparlera encore dans 50 ans de la saison en triple-double de RW, tandis que celle, au demeurant exceptionnelle de James Harden, ne sera qu’une très très bonne saison parmi d'autres.

James Harden? Non, désolé, je ne connais pas.

 

Quelques triples-doubles d'anthologie

 

Voici quelques exemples de matchs et de highlights résumant la saison exceptionnelle en TD de RW.

 

Le « quadruple-double »

 

On commence avec un petit clin d’œil aux haters avec le « quadruple double », puisqu’il ajoute 10 balles perdues en plus de ces 27 points, 15 rebonds et 13 passes contre les Warriors le 18 janvier pour une de ces retrouvailles avec KD.

 

Le plus collectif (et cette merveille de passe #love)

 

On ajoute cette magnifique passe contre les Phoenix Suns, il finira le match avec 22 passes décisives (record en carrière), aucune plus belle que celle-ci, et il finira le match avec 26 points, 22 passes et 11 rebonds.

 

Le plus parfait

 

Contre les Sixers, un triple-double express avec 100% aux tirs en seulement 28 minutes. 6-6 au tirs et 6-6 aux lancers, c’est plutôt propre (bon, par contre, 5 balles perdues, on peut pas trop en demander non plus).

 

Le plus prolifique

 

S'il a fini en triple-double, il a quand même un instinct de scoreur (validé par le meilleur d’entre tous), et ce soir de mars contre le Magic, il va réaliser son 2ème triple double avec 50 points et plus, Ah et oui, c’est lui qui envoie le match en prolongation d’un tir à 3 points (!!!) à 8 secondes de la fin du match, clutch, non ?

 

Le plus clutch

 

Transition toute trouvée avec le dernier triple-double en date du 9 avril contre les Denver Nuggets, avec ce tir à 3 points à 10 (!!) mètres au buzzer pour battre et éliminer par la même occasion les Nuggets de la course aux PO. 50 points, 16 rebonds, 10 passes, le tir de la gagne, le record de triple-double battu, les clefs de la salle et l’honneur de tout les fans des Nuggets, une bonne soirée, non ?

Le plus lourd en PO

 

Cette nuit, lors de la défaite contre les Rockets de.... James Harden, il a réalisé le TD le plus prolifique au scoring de toute l'histoire des PO, avec 51 points, 13 passes et 10 rebonds. Malheureusement, son équipe a perdu et lui a plutôt été mauvais dans le money time (un mignon 4/18 aux tirs en 4ème quart temps), un point noir pour sa candidature au titre de MVP?

 

 

[1] Statistiques arrêtées à la fin de la saison régulière.

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