Il était une fois : la folie du but de Gignac à Caen

Tous les passionnés de football ont, dans leur vie, vu et admiré des milliers de buts. Que ce soit des buts de leur équipe favorite ou d’une autre équipe, qu’ils soient beaux ou beaucoup moins, de nombreux restent dans la mémoire. Mais certains y sont ancrés de manière bien plus puissante et indélébile et c’est eux dont j’ai envie de parler. 1er volet aujourd’hui avec un but d’André Pierre Gignac face à Caen.

Nous sommes le 4 octobre 2014 et l’Olympique de Marseille va affronter Caen pour le compte de la 9ème journée de Ligue 1. Jusqu’ici rien d’exceptionnel. Sauf qu’il n’y a rien d’ordinaire à l’OM et ce début de championnat ne déroge pas à la règle. Les hommes de Marcelo Bielsa trustent la 1ère place du championnat, restent sur 6 victoires consécutives et pratiquent alors le plus beau football hexagonal et clairement l’un des plus attrayants en Europe. Rien ne les arrête.

Ce match à Caen est tout sauf une promenade de santé, les marseillais jouent un beau football mais tombent sur une équipe elle aussi joueuse et comme à son habitude très difficile à accrocher dans son stade. Les occasions se multiplient, tantôt ce sont les marseillais qui se mettent en évidence, tantôt ce sont les caennais. Le match est animé et offre un magnifique spectacle comme on aimerait en voir chaque semaine. À un quart d’heure de la fin, Romao ouvre le score d’une belle tête sur un corner et on se dit alors que les olympiens ont fait le plus dur. Mais 10 minutes plus tard, Caen égalise et plonge le match dans un suspense incroyable.

Alors qu’on peut s’imaginer les marseillais se contenter d’un match nul qui prolongerait leur série d’invincibilité, il va se passer tout le contraire. Sous les ordres d’un Marcelo Bielsa qui ne tient plus en place, les olympiens vont littéralement se ruer à l’assaut des buts de Vercoutre. C’est une attaque-défense, les caennais ne voient plus le ballon confisqué par une équipe olympienne qui jette toutes ses forces pour gagner ce match.

C’est alors qu’intervient la 92ème minute, Stéphane Guy et Franck Sauzée aux commentaires n’en peuvent plus, ébouriffés qu’ils sont par le merveilleux spectacle qu’offre l’OM. Devant mon écran, je suis dans un état inqualifiable et qui ne m’est jamais arrivé pour un « simple » match de Ligue 1. Je suis tendu comme si c’était une finale, je ne tiens plus en place et je sens que la victoire est au bout du canon.

Caen - Olympique de Marseille 1-2 Gignac 93' (04/10/2014) - remise tête André Ayew

Il ne reste qu’une minute à jouer, le ballon est dans les pieds de Rod Fanni alors positionné près du rond central. Voici de nombreuses secondes que seul Mandanda est dans le camp marseillais avec Jérémy Morel, vous avez bien lu, seuls 2 marseillais sont dans leur camp, les autres sont à l’attaque et pour la plupart très proche du but. Fanni balance un long ballon sur la tête d’Ayew, on sent une défense caennaise fatiguée par les assauts répétées et qui a du mal à s’organiser. La balle revient dans les pieds de Mendy à l’entrée de la surface. Pause.

Mais...Que fait Mendy dans cette position, si près de la surface et à cet instant de la partie ? Pourquoi donc est-il ici à ce moment là ? Tout simplement parce que la définition de l’OM de Marcelo Bielsa est ainsi, tout pour la gagne et la devise « Droit au but » n’a jamais parue aussi vraie qu’à cet instant. Reprenons.

Mendy est en possession du ballon, il peut tirer même si ce n’est pas sa qualité première d’autant plus qu’il est sur son mauvais pied, le droit. Je lui hurle de passer le ballon mais je sais qu'à ce moment-là de la partie et avec la fatigue accumulée, on ne réfléchie pas correctement et le manque de lucidité entraine un mauvais choix. Devant lui, Gignac fait des grands signes qui semblent dire « mets la moi », mais tout va vite, tout va bien trop vite et les espaces se réduisent. Pourtant Mendy va bel et bien apercevoir les gestes du numéro 9 marseillais et va décaler Gignac d’une parfaite passe du pied droit (qui on le répète n’est pas son pied fort, ce qui pimente un peu le truc). Après le match il déclarera « si je n’avais pas fait la passe à DD il m’aurait tué », tu as bien fait !

Caen - Olympique de Marseille 1-2 Gignac 93' (04/10/2014) - Passe de Benjamin Mendy

Gignac reçoit le ballon, tout va vite et mon stress est à son paroxysme. Il ne peut pas la rater il réussit tout en ce début de saison... Il est entouré de 2 joueurs + 1 qui est un peu plus loin, il doit frapper directement il n’a pas le temps de contrôler. Pourtant c’est ce qu’il fait ! Il va amortir le ballon du pied droit et dans un enchainement ultra rapide, va loger le ballon dans la lucarne de Vercoutre dépité comme les défenseurs caennais qui n’en reviennent pas.

D’ailleurs, personne ne semble y croire, ni Stéphane Guy et Franck Sauzée qui sont en folie, ni Marcelo Bielsa qui semble délivré, ni les milliers de spectateurs éberlués, ni moi qui sombre dans un état second. L’OM n’a même pas encore gagné le match, l’OM n’a pas gagné un trophée mais ma joie est indescriptible. Rarement j’ai été dans un tel état, rarement j’ai autant fêté un but et jamais je ne l’avais fait pour un match si banal. Le bonheur est immense parce qu’il récompense le panache et l’audace d’une équipe magnifique qui n’a rien lâché. Mais il est immense parce qu’on sent et qu’on voit des joueurs heureux, un staff heureux, des commentateurs heureux du spectacle auquel ils ont assisté et participé.

Caen - Olympique de Marseille 1-2 Gignac 93' (04/10/2014) - Bielsa et Gignac

Symbole de cet orgasme footballistique : l’accolade entre Marcelo Bielsa et André Pierre Gignac désormais mythique. Cet homme si discret, si particulier, qui semble ne pas aimer le contact humain ou les relations humaines plongent dans une euphorie qu’il ne contrôle pas et qui semble complètement dépassé un Gignac surement surpris lui même d’un tel geste envers son coach. Mais l’image est belle et prouve clairement que ce match et surtout ce but n’est pas un moment ordinaire.

1 comment

  1. Latche 24 septembre, 2016 at 14:34

     » Stéphane Guy et Franck Sauzée aux commentaires n’en peuvent plus, ébouriffés qu’ils sont par le merveilleux spectacle qu’offre l’OM »…..
    Je me rappelle cependant que l’OM n’avait pas joué son meilleur match ce soir là, bien emmerdé par un Caen redoutable sur les attaques rapides.
    D’ailleurs à cette époque là Guy répétait à l’envie que l’OM était cramé à la 60 ème minute de chaque match !

Leave a reply