OM ET ADIDAS | La folle histoire de l'OM et d'Adidas (1)

OMForum décrypte | Les destins d'Adidas et de l'Olympique Marseille se sont croisés pour la première fois en 1975. Depuis les années 90, le club phocéen et l'équipementier ont vécu une relation assez unique dans le sport français, et ils ont partagé à deux reprises le même propriétaire. Certains enjeux propres à Adidas ont eu un impact majeur sur l'Olympique de Marseille.

Décryptage à partir notamment de deux ouvrages "Comment Adidas devient l'un des plus beaux redressements de l'histoire du business" d'Éric Wattez et "Robert Louis-Dreyfus, l'incroyable odyssée d'un rebelle des affaires" de Jean-Claude Bourbon et Jacques-Olivier Martin. La majorité des citations de l'article sont issues d'un de ces deux ouvrages.

Nous avons également eu la chance d'obtenir une entrevue du professeur et docteur en marketing Peter Rohlmann, un des meilleurs spécialistes européens en marketing sportif, ce qui nous a permis d'avoir une vision experte et dépassionnée du dossier.

 


Les destins de l'OM et d'Adidas s'entrecroisent

Pourquoi RLD a racheté l'OM

Un équipementier parasite ?

A quoi s'attendre pour le futur ?


 

 La lignée Dassler ou les origines de l'empire Adidas

Les origines d'Adidas viennent d'Adolf Dassler, dit Adi. Ce cordonnier allemand crée dans les années 20 et 30 des chaussures spécifiques pour différents sports. Le légendaire Jesse Owens lui-même était chaussé de Dassler lors de son exploit aux jeux olympiques de Berlin. En 1948, suite à une brouille majeure avec son frère Rudolf (qui était son partenaire), deux entreprises sont créées sur les cendres de Dassler : Adi crée Adidas (Adi-Dassler) alors que Rudolf crée Puma. De manière incroyable, les deux futurs géants du sport ont leur usine dans la même petite ville allemande, Herzogenaurach, une sur chaque rive de la rivière Aurach. Le fils d'Adi, Horst Dassler, va devenir dès l'âge de 20 ans un agent majeur du développement d'Adidas en inaugurant une nouvelle méthode : il va donner aux meilleurs athlètes des chaussures, tout en s'assurant d'entretenir des amitiés durables avec les sportifs. Le summum de cette stratégie arrive alors en 1968 aux JO de Mexico avec 85% des athlètes équipés en Adidas.

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La fédération internationale d'athlétisme amateur décide alors d'interdire les chaussures faisant apparaître un sponsor, un véritable diktat anti-Adidas. Qu'à cela ne tienne, Dassler décide alors d'équiper les fédérations nationales. En parallèle de l'histoire d'Adidas, Horst Dassler s'est fâché à mort avec son père. Ils négocient alors une entente : Horst continuera à être le VRP d'Adidas, mais en échange son père lui laissera développer sans contrainte la filiale française, en Alsace. Afin de ne pas trop inquiéter ses concurrents, il planifie une consolidation d'Adidas en rachetant de nombreuses entreprises, mais en utilisant le fameux André Guelfi (Dédé la sardine) comme prête-nom : le Coq Sportif (en 1975), Arena, Façonnable, Pony.

C'est à ce moment-là que les destinées de l'OM et d'Adidas se croisent pour la première fois, puisque coïncidence ou non, c'est également en 1975 que l'OM change d'équipementier et quitte Le Coq Sportif pour Adidas.

Au décès de son père, en 1978, c'est sa mère qui devient la plus haute dirigeante d'Adidas, mais Horst Dassler continuera à œuvrer brillamment en termes de politique sportive, en plaçant successivement Havelange à la FIFA, Samaranch au CIO, puis en devenant le principal sponsor des coupes du monde de football et des JO. Il faudra attendre 1985 et le décès de sa mère pour que Horst atteigne enfin le Graal en dirigeant l'empire familial. Il n'en profitera que deux ans, puisqu'il décédera à son tour en 1987, juste après avoir été au centre d'un scandale majeur de corruption et de largesses financières aux sportifs et aux journalistes, aux membres du CIO etc.

Quand Tapie, puis RLD, rachètent Adidas

Suite à son décès, Adidas entre en crise, délocalise massivement et a beaucoup de mal à faire face aux concurrences de Nike et Reebok. Par ailleurs, la gouvernance d'Adidas complexifie le tout avec les 4 sœurs d'Horst Dassler qui se partagent le pouvoir, sans réussir à trouver les personnes capables de redresser l'entreprise. L'endettement explose, les résultats s'effondrent et Adidas cherche désespérément de l'argent ou un éventuel repreneur.

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Pendant qu'Adidas s'effondre, l'OM s'envole. Guidé par un Bernard Tapie à qui tout réussit, le club phocéen devient le plus grand club français et un candidat majeur au titre de Champion d'Europe. Et en 1990, Bernard Tapie crée la surprise en reprenant Adidas aux quatre sœurs d'Horst Dassler. Mais l'homme d'affaires français a d'autres passions et son passage aura plutôt eu comme conséquence d'accentuer la crise à Adidas. Selon un de ses anciens employés cité dans le livre d'Éric Wattez "peu de temps après la reprise d'Adidas, il ne pensait déjà plus qu'à ses autres marottes : l'Olympique de Marseille et la politique". Très critiqué par l'opinion publique allemande, qui le présente comme un vulgaire aventurier indigne d'Adidas, Tapie fait un coup de génie en recrutant en septembre 90 Franz Beckenbauer, l'ex-sélectionneur champion du monde en titre avec l'Allemagne. Cela permettra de retourner l'opinion publique allemande, alors convaincue que si Tapie peut convaincre le Kaiser, il peut être digne d'Adidas. Mais Adidas replonge rapidement en crise et Tapie est de plus en plus critiqué, trop obsédé par ses objectifs politiques.

Parallèlement, en 1992, alors que Robert Louis-Dreyfus est en train de redresser Saatchi et Saatchi, c'est son ami Christian Tourres qui le harcèle pour saisir l'opportunité de racheter Adidas à Bernard Tapie, et pour cela, Tourres sait qu'il a un atout dans sa manche. Adidas, c'est la certitude d'entrer dans le monde du sport et donc de réaliser le rêve de gosse de RLD.

RLD se laissera convaincre et réalisera finalement l'affaire de sa vie en rachetant Adidas, presque sans investir ses fonds propres.

 

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