Bielsa, les marseillais et le syndrome de Stockholm

Le titre est assez étrange, tiré par les cheveux, a surement dû vous surprendre et a peut-être entrainé chez vous ce questionnement : « encore un article sur Bielsa ? ». Attendez au moins de lire ces quelques lignes et je suis sur que vous comprendrez aisément où je veux en venir.

Rapidement et pour vous éviter de chercher la définition du syndrome de Stockholm, je vais le définir en quelques mots. En gros c’est un phénomène psychologique assez spécial qui peut arriver après une longue séquestration et qui entraine chez la victime une compassion ou une sorte d’affection envers son « bourreau » (appelez-le comme vous voulez). J’imagine que vous êtes en train de faire les gros yeux en associant les termes « bourreau » et « Bielsa » mais je vais vous expliquer dans la foulée le pourquoi du comment. C’est parti.

La séquestration

La première phase de ce phénomène démarre évidemment par une séquestration, ici ce sera la saison de l’Olympique de Marseille 2014-2015. Pourquoi séquestration ? Durant des mois et des mois, El Loco nous a totalement enfermé dans ses idées, dans son football, dans son univers, dans sa folie, dans son génie. Il était quasiment impossible pour nous supporters de l’OM de nous en détacher, de s’évader de ces sentiments qui nous faisaient du bien lors de ces matchs épiques et somptueux mais également du mal lorsque l’équipe perdait ou lorsque les critiques fusaient sur le technicien argentin. Nous avons vécu cette saison comme une sorte d’enfermement, coupés d’un passé proche peu resplendissant et coupés d’un futur qu’on espérait magnifique. Nous vivions alors l’instant présent comme rarement nous avons pu le faire ces dernières années à Marseille, nous nous plaisions dans cette situation sans se sentir confiné dans une spirale qui parfois nous échappait. Evidemment cette séquestration est bien plus angélique que celle que peut vivre un otage ou un journaliste capturé. Dans ces situations, c’est souvent un preneur d’otage ou un groupe armé qui ont le contrôle de la vie des prisonniers, dans notre situation c’est plutôt une partie de nos émotions que nous mettions entre les mains d’un seul homme.

L’acte de violence

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Parfois le syndrome de Stockholm ne met pas forcément en cause la violence, qu’elle soit physique ou morale. Il se peut simplement qu’un geôlier tienne en otage une personne durant une certaine période sans lui faire du mal et que cette dernière éprouve de l’empathie pour son ravisseur. Or évidemment quand on parle de l’Olympique de Marseille, cela ne peut pas être aussi simple et lisse, il faut du sang et des larmes. C’est le 8 août de l’année 2015 que cet acte de violence s’est produit avec la démission de Marcelo Bielsa. Cette décision a fait l’effet d’une bombe qui a entrainé un drame total dans les minutes, les heures, les jours et les semaines qui ont suivi. Beaucoup se sont sentis trahi, d’autres uniquement déçus et certains ont compris son choix, souvent aveuglés par l’amour qu’ils portaient à Marcelo. Cette décision soudaine n’a laissé personne indifférent, elle a décuplé l’amour que les supporters portaient (et portent encore) à l’entraineur argentin. Un coup si fort peut faire du mal, il peut laisser des traces et donc comme le veut le syndrome de Stockholm, il entraine chez le supporter marseillais une phase de dépendance envers cette personne qui l’a pourtant trahi. Et cette dépendance peut durer longtemps avec l’acte de violence, nous en avons la preuve à Marseille.

Malgré tout, l’amour...

Enfin, pour que ce syndrome perdure et pour montrer qu’il est bien présent, il faut quelques critères qui dans le cas de Marcelo Bielsa et l’OM sont totalement réunis.

D’abord, il faut de la sympathie entre les différentes parties, surtout des victimes pour la personne leur ayant causé du tort. Marcelo Bielsa, bien que parti en ayant claqué la porte, garde une côte de popularité et d’amour immense à Marseille. Même si quelques supporters ne lui pardonneront jamais son geste, la plupart le comprennent et en viennent même à lui donner raison en critiquant les dirigeants de l’OM. Et c’est là qu’intervient un autre critère du syndrome de Stockholm. Dans le cas d’une prise d’otage, une victime peut se lier avec le preneur d’otage contre la police car cette dernière est vue comme le symbole du mal. C’est ce qu’il se passe à Marseille où les supporters ont massivement choisi d’incriminer la direction quant au départ de Marcelo Bielsa. Ce dernier n’est plus vu comme le « méchant » avec tous sentiments négatifs que cela comporte mais bel et bien comme quelqu’un d’honnête et droit qui a défié une autorité incompétente. El Loco est désormais considéré comme une personne de confiance, une personne que l’on regrette car la douleur de son départ n’est rien comparée au bonheur de sa présence, car la douleur de son départ n’est rien par rapport à la douleur de son absence.

Si le syndrome de Stockholm existe dans cette situation, c’est parce qu’il a entrainé chez certaines victimes (supporters marseillais) le sentiment que finalement c’est en partie grâce au geôlier (Bielsa) qu’elles sont encore en vie.

Ce phénomène psychologique vient d’une addition de facteurs mêlant le choc psychologique vécu et la durée d’enfermement. À partir de cet instant, la victime n’est plus capable d’être autonome, son cerveau n’est plus capable de réagir de la même manière face à de nouvelles informations. C’est alors que ce même cerveau se met à s’adapter et qu’il entraine de la compréhension et de la reconnaissance chez la victime envers son ravisseur. Voici très schématiquement ce qu’il s’est passé avec Marcelo Bielsa, la perte de repères nous a fait perdre tout sens moral, toute incapacité à juger négativement et surtout a entrainé en nous une forte dépendance envers cet entraineur qui aujourd’hui nous manque cruellement.

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2 comments

  1. Zitka 24 avril, 2016 at 23:20

    Nimp.. De tout ses passages en club ou ailleurs il y a un trait chez Bielsa qui est toujours le même… Il est droit jusqu’à l’extrême. Pas de compromission sur ce qui a été négocié, jamais, à aucun prix. Le respect de la parole donnée… Quelque chose qui avait encore cours jusqu’au années Mitterand.
    Ce mec est un anachronisme. C’est bien pour ça qu’il n’a pas la carrière de son talent.

    Le célèbre clash de septembre avec Labrune parce qu’il l’avait enflé sur les joueurs, c’est pas du au fait que les joueurs étaient moins bon c’est le fait que le prèz aie cru bon de l’enfler. Alors qu’à 10 contre un il aurait joué carte sur table au lieu de tortiller son cul avec de fausses promesses le Labrune, cela n’aurait jamais eu lieu

    Le contrat Oral est encore valable en droit français, marrant hein! Évidemment quand 99.9% des gens considéraient que manquer à son honneur était inacceptable ça marchait. Le célèbre Tope là!

    Dans un monde de vipères qui se tordent et se courbent, le gars avançait en ligne droite. C’est déclencheur d’évènement c’est sur. Clashs, crises et finalement démission…

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