OMFORUM DÉCRYPTE | André Ayew à Swansea ou l'impossible concurrence sur les primes à la signature

Vous avez l'habitude sur OMForum d'avoir des informations sur les salaires des joueurs de l'OM, aujourd'hui, nous allons essayer de faire abstraction de ces salaires et de nous concentrer sur les primes à la signature.

Quand on est supporter et émotionnellement impliqué dans le mercato de son club de cœur, on a du mal à admettre pourquoi celui-ci n'a pas pu conserver un joueur en fin de contrat.
Après tout, il n’est pas plus cher qu’un joueur libre qui vient d’ailleurs, il est déjà adapté au club, au schéma de l’entraineur, et pourtant, inexorablement, il nous quitte pour d’autres cieux.
Cette série de fins de contrats, qui dépasse largement le cas de l’OM, ne peut être comprise sans mettre en perspective les enjeux fiscaux et sociaux colossaux dans ce domaine.

Prenons l’exemple d’André Ayew, puisque les montants ont été largement communiqués et essayons de nous mettre dans la peau de Vincent Labrune dans ce dossier, puisque personne ne souhaite décemment se mettre dans sa tête, avec cette coupe qui est passée de mode depuis Jon Bon Jovi.

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L’analyse fiscale d’une opération se traite au regard de la situation de celui qui donne, mais aussi de celui qui reçoit.

Combien aurait payé à l'OM ?

En France, pour celui qui donne : renouveler un CDD en versant une prime à la signature à son futur-ex employé est considéré comme un salaire. Ceci entraine deux conséquences importantes et immédiates : il faut payer les charges dessus, et on ne peut pas lisser comptablement la dépense sur plusieurs années : c’est une charge sèche, comme un salaire lambda, à imputer sans délai, et qui impacte donc à 100% de son montant la trésorerie du club. Pour 8 millions de virement au profit de André Ayew, le coût comptable immédiat est de 15,2 millions, à imputer sur le budget en cours.

Ayew

Ayew se rend compte des impôts qu'il doit payer

Pour celui qui reçoit : la somme est traitée comme un salaire, donc soumise à l’impôt sur le revenu. En faisant abstraction de l’impôt à 75%, la tranche marginale d’imposition est actuellement de 45%. L’ensemble des joueurs de foot y est soumise, puisque celle-ci débute à compter de 80.000 €… annuels ! Sur les 8 millions perçus, il ne reste donc que 4,4 millions dans la poche d’André. Et le club a dépensé 15,2 millions !
Cela représente un rendement catastrophique de 28,9%.

Combien a payé Swansea pour Ayew ?

En Angleterre, pour celui qui donne : la somme versée pour l’acquisition d’un actif n’est pas fiscalisée. Quand une entreprise achète un actif mobilier, elle n’a pas de droits d’enregistrement à payer. C’est une mesure logique, identique en France, destinée à ne pas freiner l’investissement.
Les 8 millions coûtent non seulement 8 millions, mais leur imputation comptable peut être lissée sur la durée du contrat. C’est la raison des contrats longs signés par les joueurs en ce moment. Dans le cas d’André Ayew, son contrat de 5 ans est amorti linéairement à 1,6 millions d’euros par an seulement ! Le solde de la somme versé est finançable et n'impacte la trésorerie disponible du club qui recrute le joueur, pour l'année en cours, que d'un cinquième de la dépense globale.

Ayew Swansea

L'amour du maillot

Pour celui qui reçoit : il est très probable que le joueur ne sollicite pas la somme en nom propre. Une société portant son image, idéalement placée dans un paradis fiscal britannique (et ils ne manquent pas) peut recevoir la somme et ne payer aucune taxe. Sans prendre de risques, une simple société Irlandaise plafonne à 12,5% d’impôt sur les sociétés.
C’est donc 7 millions qui se retrouvent dans la poche d’André (et ses proches), avec un rendement de 87,5% des 8 millions dépensés par le club qui l’accueille, soit un rendement 3 fois plus élevé qu’en France.

La concurrence impossible dans les prolongations

Pour résumer, pour qu'André Ayew puisse percevoir ses 7 millions nets, cela a coûté 1,6 millions sur le budget 2015-2016 de Swansea. Pour la même somme, le budget 2015-2016 de l'OM aurait été grêvé de 24,2 millions. Si on ajoute à ça le fait que Swansea a perçu 110 millions de droits TV en 2014-2015, ce qui correspond pratiquement au budget total de l'OM pour la saison prochaine, on se rend compte que les deux clubs évoluent dans des univers différents. Et nous n'avons évidemment pas évoqué (comme promis), la question des salaires qui est au centre des discussions cette année à Marseille.

À noter que la situation est identique en Russie ou au Mexique où (tiens tiens) il existe une des fiscalités les plus favorables du monde pour les hauts salaires. Le salaire de Gignac, au-delà de la prime, est très bien traité avec notamment des plafonnements de charges et autres. Cette politique a été mise en place pour attirer les chefs d'entreprise américains.

Il ne faut pas s’étonner, si Nicolas Nkoulou va au terme de son contrat avec nous, de le voir signer dans un club anglais, russe ou mexicain. Tout joueur de football motivé par les enjeux financiers ne peut faire que ce choix logique. À part peut-être s'il n'y a que Lyon pour le vouloir...

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